Dominique DESPREZ, Nicolas DRILLAUD, Claire FLAUJAC, Fabienne VOLOT, Brigitte PAN PETESCH, Philippe BEURRIER, Vincent CUSSAC, Olivier FEUGEAS, Yoann PAILLER, Anamaria CALLEGARIN, Marc TROSSAËRT, Emmanuelle de RAUCOURT
La prise en charge péri opératoire d’un patient atteint de maladie de Willebrand (MvW) consiste à prévenir le risque hémorragique tout en contrôlant le risque thrombotique. Actuellement cette prévention repose essentiellement sur deux types de thérapeutiques, la desmopressine et les concentrés de facteur Willebrand. En mai 2018, le vonicog alfa est le premier concentré de facteur Willebrand recombinant produit à partir des cellules CHO à obtenir l’AMM. Le vonicog alfa n’étant pas exposé à la métalloprotéase ADAMTS13 durant son processus de fabrication, il contient une concentration élevée de multimères de très haut poids moléculaire (MHPM) lui conférant un pouvoir hémostatique important. Par ailleurs, sa demi vie moyenne est de 21.9 h. A l’exclusion de l’étude de Peyvandi (15 patients) et l’expérience de Man (6 patients), il existe peu de données sur l’utilisation du vonicog alfa en chirurgie.
Lors d’une étude multicentrique rétrospective, 63 chirurgies ont été colligées (33 mineurs-30 majeurs) sous vonicog alfa chez 55 patients suivis dans 7 CRC –MHC Français (Amiens, Anger, Brest, Dijon, Nantes, Strasbourg et Versailles). L’âge médian des patients était de 44 ans (18-77) avec un sexe ratio de 0.8. 40 % de type 1, 56 % de type 2 et 4% de type 3 ont été individualisés.
Pour les chirurgies mineures, le nombre d’injection médiane a été de 1 (1-8) avec une consommation médiane de 37.5 UI/kg (12-288) et un bolus préopératoire de 35 UI/kg (19-56). Pour les chirurgies majeures, le nombre d’injection médiane a été de 3 (1-14) avec une consommation médiane de 108 UI/kg (22-340) et un bolus préopératoire de 36 UI/kg (12-51). Au total, 182 injections de vonicog alfa ont été réalisées lors de ces 55 chirurgies. L’acide tranexamique a été associé dans 15 chirurgies (7 chirurgies mineures et 8 chirurgies majeures). Une thromboprophylaxie par HBPM a été instaurée au décours de 12 chirurgies (3 chirurgies mineures et 9 chirurgies majeures).
L’efficacité clinique a été jugé excellente/bonne pour 61 chirurgies, moyenne pour 1 chirurgie (amygdalectomie avec chute d’escarre hémorragique chez un patient intolérant à l’acide tranexamique) et mauvaise pour 1 chirurgie (réattribution sexuelle, chirurgie très hémorragique).
Trente-huit chirurgies ont été monitorées biologiquement, la récupération médiane du vonicog alfa a été de 2,43 UI/mL/UI/kg (1-4,36), par ailleurs le vonicog alfa a permis une bonne stabilisation du facteur VIII endogène des patients sans accumulation excessive.
La tolérance a été globalement bonne sans complication thrombotique, ni effet indésirable. Cette étude est la première étude de données en vie réelle qui a mis en avant l’efficacité hémostatique du vonicog alfa en contexte chirurgical avec une durée de substitution et des doses moins importantes qu’avec les produits conventionnels, grâce à la demi-vie prolongée du vonicog alfa et/ou une meilleure récupération in-vivo.
Ces résultats très prometteurs devront cependant être confirmés par une étude clinique à plus grande échelle, incluant des chirurgies majeures chez des patients atteints de maladie de Willebrand de type 3.